Le petit mazot

Le chalet Molly : le petit mazot
Le chalet Molly : le petit mazot

 

 

Tout près du chant de l’oiseau,

Bien loin du bruit de la rue,

Il est là-haut le mazot (1),

Tout en haut de la pente herbue.

 

Il est hâlé du soleil ;

Le temps lui creusa des rides,

Mais, malgré qu’il est bien vieil,

Les poutres en sont solides.

 

La fenière est sous le toit

Où l’on couche par douzaine ;

De la galerie en bois,

On voit la ville lointaine.

 

Puis en bas, sous l’escalier,

La grande salle pavée

Où l’on danse en gros souliers

Très longtemps dans la soirée.

 

Près du chalet, le bourneau,

Au bassin fait d’un tronc d’arbre ;

Je le trouve bien plus beau

Qu’un très beau bassin de marbre !

 

Plus loin, c’est le poulailler,

Petit mazot où les poules

Ne font que se batailler

Pour un rien, pour l’eau qui coule…

 

Sur le flanc du mont fleuri,

Le petit chemin serpente

Dans les champs de blé jaunis,

Qui couvrent la haute pente.

 

Sur ce chemin, grave et lent,

Un gros char de foin s’avance.

Les deux bœufs au pas pesant

Tirent, sans perdre patience.

 

C’est le soir, et le chalet

Se détache noir et sombre

Au ciel orange et violet

L’étoile paraît dans l’ombre.

 

 

Dans le silence croissant

Monte le chant des cigales (2),

Cri monotone et strident.

- - - - - - - - - - - - - - - - - -

Une lampe est allumée, en bas dans la salle.

 

Juillet 1908

M. Chevallier (3)

 

Notes :

(1) Il s'agit du chalet Molly détruit en 1985. Voir le rubrique "les bâtiments il y a un siècle"

(2) Il n’y a pas de cigales au Salève. Le « cri monotone et strident » est celui des grillons.

(3) Maurice Chevallier, parent de la famille Molly. Enseignant à Genève.